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un malheur devenu un fait accompli, que d’obtenir notre consentement à une démarche qui nous contrarie ; il persuada donc à Charlotte que le parti le plus sage était d’envoyer Ottilie à la pension.

A peine avait-il quitté la maison, qu’on disposa tout pour ce départ précipité. Ottilie aida elle-même à faire les paquets ; mais il était facile de voir qu’elle ne voulait emporter ni le beau coffre qu’elle avait reçu d’Édouard ni aucun des objets qu’il contenait. Charlotte laissa agir la silencieuse enfant au gré de ses désirs. Le voyage devait se faire dans sa voiture, et l’on était convenu qu’elle passerait la première nuit à moitié chemin, dans une auberge où Charlotte et les siens avaient l’habitude de descendre ; la seconde nuit elle ne pouvait manquer d’arriver à la pension ; Nanny devait l’accompagner et rester près d’elle en qualité de domestique.

Immédiatement après la mort de l’enfant, cette impressionnable jeune fille était revenue près d’Ottilie, qu’elle paraissait aimer plus passionnément que jamais. Cherchant à la distraire par son babil et l’entourant des soins les plus tendres, elle ne respirait plus que pour sa chère maîtresse. En apprenant qu’on lui permettait de la suivre et de rester près d’elle, et qu’elle verrait des contrées inconnues, car elle n’était jamais sortie de son village, elle ne se connaissait plus de joie, et courait à chaque instant chez ses parents, chez ses amis et ses connaissances pour prendre congé d’eux et leur faire part de son bonheur. Malheureusement elle entra dans une chambre où il y avait des enfants malades de la rougeole, et elle ressentit aussitôt l’effet de la contagion.

Charlotte ne voulait pas retarder le départ de sa