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outes les femmes désiraient lui plaire. La préférence marquée d’un tel homme sur une foule de jeunes filles plus riches et plus brillantes qu’elle, ne pouvait manquer de la flatter. Les soins qu’il lui rendait étaient constants, mais sans importunité, et elle pouvait, dans toutes les éventualités possibles, compter sur son appui. Il avait positivement demandé sa main à ses parents, en prenant toutefois l’engagement d’attendre aussi longtemps qu’on le jugerait convenable, puisqu’elle était encore trop jeune pour se marier immédiatement. L’habitude de le voir chaque jour et d’entendre sa famille et ses amis parler de lui comme de son fiancé, l’amenèrent insensiblement à croire qu’il l’était en effet. Les anneaux furent échangés, et personne n’avait songé que les jeunes gens ne se connaissaient pas encore assez pour que l’on pût, sans imprudence, les unir par une cérémonie qui est presque un mariage.

Les fiançailles ne changèrent rien à la situation calme et paisible des futurs époux ; des deux côtés les relations restèrent les mêmes, on s’estimait heureux de vivre ainsi ensemble et de prolonger aussi longtemps que possible le printemps de la vie, qui n’est toujours que trop tôt remplacé par les chaleurs fatigantes et par les orages de l’été.

Pendant ce temps le jeune homme absent était devenu un officier distingué ; un grade mérité venait de lui être accordé, et il obtint sans peine la permission d’aller passer quelques semaines avec ses parents, ce qui le plaça de nouveau en face de sa belle voisine.

Cette jeune personne n’avait encore éprouvé que des affections de famille, et le sentiment paisible d’une fiancée qui accepte sans répugnance l’homme qu’on lui destine. En harmonie parfaite avec son entourage