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ais sans pompe. Au jour et à l’heure indiqués, le vieux pasteur, soutenu par un servant, entra dans la salle du château, où quelques amis intimes s’étaient réunis pour assister à la cérémonie. Ottilie devait être la marraine et Mittler le parrain.

Dès que la première prière fut terminée, la jeune fille prit l’enfant sur ses bras pour le présenter au baptême ; ses regards s’arrêtèrent sur lui avec une douce tendresse, et rencontrèrent ses grands yeux qu’il venait d’ouvrir pour la première fois. En ce moment elle crut voir ses propres yeux, et cette ressemblance frappante la fit tressaillir. Lorsque Mittler prit l’enfant à son tour, il éprouva une surprise tout aussi grande, mais d’une nature bien différente ; car il reconnut sur ce jeune visage les traits du Capitaine reproduits avec une fidélité dont il n’avait pas encore vu d’exemple.

Le bon pasteur se sentit trop faible pour ajouter à la liturgie d’usage, une allocution que la circonstance rendait indispensable. Mittler, qui avait passé une partie de sa vie dans l’exercice de ces pieuses fonctions, ne voyait jamais s’accomplir une cérémonie quelconque, sans se mettre par la pensée à la place de l’officiant. Dans la situation où il se trouvait en ce moment, son imagination devait nécessairement agir avec plus de force que jamais, et il se laissa entraîner d’autant plus facilement, qu’il n’avait devant lui qu’un auditoire peu nombreux et composé d’amis intimes.

Exposant d’abord avec beaucoup de simplicité ses devoirs et ses espérances, en sa qualité de parrain, il s’anima par degrés, car il se sentit encouragé par la vive satisfaction qui épanouissait les traits de Charlotte. Sans s’apercevoir que le vieux pasteur, épuisé de fatigue, faisait des efforts inouïs pour continuer à se tenir debout,