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un amour qu’elle ne pourrait manquer de lui accorder.

Lorsque des personnes qui cherchent depuis longtemps à s’expliquer sur une affaire importante et grave, sont parvenues enfin à la mettre en question, et se sont convaincues que l’instant de la traiter à fond n’est pas venu encore, leur entretien est toujours suivi d’un silence qui ressemble à l’embarras, à la gêne.

Charlotte et sa nièce ne trouvaient plus rien à dire, et le Professeur se mit à feuilleter le volume de gravures contenant les diverses espèces de singes, resté au salon depuis qu’on l’y avait apporté pour amuser Luciane. Ce recueil était peu de son goût sans doute, car il le referma presque aussitôt ; mais il paraît avoir donné lieu à une conversation dont nous retrouvons les principaux traits dans le journal d’Ottilie.

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EXTRAIT DU JOURNAL D’OTTILIE.

« Je ne comprends pas comment on peut consacrer son temps et son art à retracer l’image d’un singe. Il me semble qu’il est presque avilissant d’accorder à ces vilaines créatures une place dans la famille des animaux ; mais il faut être méchant et malicieux pour retrouver sous ces masques hideux des êtres humains, et surtout ceux dont se compose le cercle de nos amis et de nos connaissances. »

« C’est toujours par un travers d’esprit que nous aimons à nous occuper des charges et des caricatures. Je remercie beaucoup mon bon professeur de ne m’avoir pas imposé l’étude de l’histoire naturelle ; je n’aurais jamais