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ses parties, attachez-vous-y avec fermeté, avec opiniâtreté même, puis interrogez un certain nombre d’enfants sur ce sujet, et vous reconnaîtrez sans peine ce qu’ils savent déjà, et ce qu’il faudra leur apprendre encore. Qu’importe que leurs réponses soient incohérentes ou relatives à des sujets étrangers ; si vos questions les ramènent, si vous restez inébranlable dans le cercle que vous vous êtes tracé, vous finirez par les contraindre à ne penser, à ne concevoir, à ne comprendre que ce que vous voulez leur enseigner. Le plus grand, le plus dangereux défaut que puisse avoir l’homme qui se consacre à l’enseignement, est de se laisser entraîner par ses élèves, et de divaguer avec eux, au lieu de les forcer à s’arrêter avec lui sur le point qu’il s’est proposé de traiter. Si vous pouviez, Madame, vous décidera faire un essai de ce genre, je crois que vous en seriez très-satisfaite.

— Il paraît, répondit Charlotte, que les règles de la bonne pédagogie sont entièrement opposées à celles du savoir-vivre. S’arrêter longtemps et avec opiniâtreté sur une même question, est une inconvenance dans le monde, tandis que la première loi de l’instituteur est d’éviter toute digression.

— Je crois que la variété sans digression serait toujours et partout agréable et utile, malheureusement il est difficile de trouver et de conserver cet admirable équilibre.

Il allait continuer, mais Charlotte venait d’apercevoir les petits jardiniers qui traversaient la cour, et elle le fit mettre à la fenêtre pour les voir passer. Il admira de nouveau leur bonne tenue, et approuva, surtout, l’uniformité de leurs vêtements.

— Les hommes, dit-il, devraient depuis leur enfance,