Page:Goethe - Les Affinités électives, Charpentier, 1844.djvu/10

Cette page n’a pas encore été corrigée

un joyeux lointain. Quant au sentier à travers les rochers, je n’ai jamais rien vu de mieux disposé. En vérité, Madame s’y entend, c’est un plaisir de travailler sous ses ordres.

— Va la prier de ma part de m’attendre ; je veux qu’elle me fasse admirer ses nouvelles créations.

Le jardinier s’éloigna en hâte. Le Baron le suivit lentement, visita en passant les terrasses et les serres, traversa le ruisseau et arriva bientôt à la place où la route se divisait en deux sentiers : l’un et l’autre conduisaient aux plantations nouvelles ; le plus court passait par le cimetière, le plus long par un bosquet touffu. Édouard choisit le dernier et se reposa sur un banc, judicieusement placé au point où le chemin commençait à devenir pénible, puis il gravit la montée qui, par plusieurs marches et points d’arrêts, le conduisit, par un sentier étroit et plus ou moins rapide, jusqu’à la cabane de mousse.

Charlotte reçut son époux à l’entrée de cette cabane, et le fit asseoir de manière qu’à travers la porte et les fenêtres ouvertes, les différents points de vue se présentèrent à lui dans toute leur beauté, mais resserrés dans des cadres étroits. Ces tableaux le charmèrent d’autant plus, que son imagination les voyait déjà parés de tout l’éclat printanier, que quelques semaines de plus ne pouvaient manquer de leur donner en effet.

— Je n’ai qu’une observation à faire, lui dit-il : la cabane me paraît un peu trop petite.

— Il y a assez de place pour nous deux, répondit Charlotte.

— Sans doute, peut-être même pour un troisième…

— Pourquoi pas ? à la rigueur, on pourrait encore admettre un quatrième. Quant aux sociétés plus nombreuses,