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le sang; une sueur froide inonda ses poils et il se vida de détresse. Le renard s'en réjouit; maintenant, il espérait vaincre. Il ne le lâcha ni des mains ni des dents et le loup tomba dans l'angoisse et dans le désespoir; il se regarda comme perdu. Le sang lui sortait des yeux; il tomba sans connaissance. Le renard n'aurait pas donné ce spectacle pour des montagnes d'or; sans lâcher prise, il tira et traîna le loup pour que tout le monde vît son état misérable, et se mit à pincer, mordre et griffer l'infortuné, qui se roulait dans la poussière et ses propres ordures en poussant des hurlements étouffés avec des convulsions et des gestes désespérés.

Ses amis poussèrent des cris de douleur, et prièrent le roi d'arrêter le combat, si tel était son bon plaisir. Et le roi répondit: «Si c'est votre avis à tous, et votre désir, qu'il en soit ainsi, je ne demande pas mieux.»

Et le roi ordonna aux deux maîtres du camp, Lynx et Léopard, d'aller trouver les deux combattants. Ils entrèrent dans le champ clos et dirent au vainqueur Reineke que cela suffisait; et que le roi désirait arrêter le combat, et faire cesser le duel. «Il désire, ajoutèrent-ils, que vous lui cédiez votre adversaire en accordant la vie au vaincu; car, si l'un de vous deux périssait dans ce duel, ce serait dommage des deux côtés. Vous avez l'avantage! petits et grands, tout le monde l'a vu. Vous avez aussi pour vous tous les seigneurs les plus braves, vous les avez gagnés pour toujours à votre cause.»

Reineke dit: «Je ne serai pas un ingrat! c'est avec plaisir que j'obéirai au roi et que je ferai ce qui doit se faire; j'ai vaincu et je ne demande rien de plus dans ma vie! que le roi me permette seulement de consulter mes amis.» Alors tous les amis de Reineke s'écrièrent tous: «Nous sommes