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Là-dessus le père s’emporta, et laissa éclater, en ces mots, sa colère :

« J’éprouve de toi peu de satisfaction. Je l’ai toujours dit, voyant tes goûts exclusivement tournés vers la charrue et les chevaux : tu fais ici la besogne d’un valet chez un riche propriétaire. Le père, pendant ce temps-là, se voit privé d’un fils qui devrait lui faire honneur devant les autres bourgeois. C’est ainsi que, dès le commencement, ta mère me berçait de vaines espérances, quand tu ne réussissais jamais comme tes camarades, à l’école, dans les exercices de lecture, d’écriture, ou d’autres études, et que tu étais toujours assis à la dernière place. Voilà ce qui arrive infailliblement, quand le sentiment de l’honneur ne fait pas battre le cœur d’un jeune homme, et qu’il n’aspire point vers quelque chose de plus élevé. Si mon père s’était occupé de mon instruction comme moi de la tienne, s’il m’avait envoyé aux écoles et donné des maitres, je serais en vérité, aujourd’hui, un autre personnage qu’aubergiste à l’enseigne du Lion d’or. »

Mais le fils, s’étant levé, s’approchait lentement et sans bruit de la porte, ne prononçant pas un seul mot. Le père, de plus en plus courroucé, s’écria :

« Va, va hors d’ici, je te connais, tête rétive ! Continue tes rustiques occupations, de façon que