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BOTANIQUE.

tion peut-elle être jamais d’accord avec une idée, puisque c’est le propre de celle-ci, de ne jamais concorder avec l’observation ? Mais puisqu’il appelait idée ce que je regardais comme de l’observation, il devait nécessairement y avoir entré nous un moyen de conciliation, un rapport inconnu. Le premier pas était fait ; Schiller, doué d’une grande force d’attraction, s’attachait tous ceux qui s’approchaient de lui. Je pris part à ses projets, et lui promis de réserver pour son journal les idées qui dormaient en moi. Sa femme, que j’avais appris à aimer et à estimer dès mon enfance, contribua pour sa part à rendre notre liaison durable. Nos amis communs étaient enchantés, et c’est par une lutte entre le sujet et l’objet, la plus grande, la plus interminable de toutes les luttes, que commença cette amitié, qui fut éternelle et féconde en heureuses influences.

Destinée du manuscrit.

(1817.)

De l’Italie, ce pays où tout a une forme, j’étais exilé en Allemagne, où tout est amorphe ; j’échangeais un ciel pur contre un ciel sombre ; mes amis, au lieu de me consoler en m’attirant à eux, me réduisaient au désespoir. On ne prenait aucune part à mes chagrins ; mes plaintes sur ce que j’avais perdu, mon enthousiasme pour des objets éloignés, à peine connus, parurent offensants.

Personne ne me comprenait. Je ne pouvais me faire à cette situation douloureuse ; la privation à laquelle mes sens extérieurs étaient condamnés devenait trop pénible, l’esprit s’éveilla alors pour rétablir l’équilibre.

Pendant deux ans, j’avais constamment observé, recueilli, réfléchi et cultivé toutes mes dispositions.