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INTRODUCTION.

naître ce qui est, et non ce qui lui convient. Le véritable botaniste ne sera touché ni de la beauté ni de l’utilité des plantes, il examinera leur structure et leurs rapports avec le reste du règne végétal. Semblable au soleil qui les éclaire et les fait germer, il doit les contempler toutes d’un œil impartial, les embrasser dans leur ensemble, et prendre ses termes de comparaison, les données de son jugement, non pas en lui-même, mais dans le cercle des choses qu’il observe.

Du moment que nous considérons un objet en lui-même, ou en rapport avec les autres, et qu’il ne nous inspire ni désir ni antipathie, alors nous pouvons, à l’aide d’une attention calme et soutenue, nous faire une idée assez nette de l’objet en lui-même, de ses parties et de ses rapports. Plus nous étendrons le champ de ces considérations, plus nous rattacherons d’objets entre eux, et plus aussi le génie d’observation dont nous sommes doués grandira par l’exercice. Si dans nos actions nous savons faire tourner nos connaissances à notre profit, nous mériterons d’être regardés comme habiles et prudents. Pour tout homme bien organisé, réfléchi naturellement, ou rendu tel par les circonstances, la prudence est chose facile ; car, dans la vie, chaque pas est une leçon. Mais appliquer cette sagacité à l’examen des phénomènes mystérieux de la nature, faire attention à chacun des pas qu’il fait dans un monde où il se trouve pour ainsi dire abandonné à lui-même, se tenir en garde contre toute précipitation, ne pas perdre de vue le but qu’il veut atteindre, sans toutefois laisser passer inaperçue aucune circonstance favorable ou défavorable, s’observer incessamment lui-même, précisément parce qu’il n’a personne pour contrôler ses actions, et se tenir constamment en garde contre ses propres résultats : telles sont les conditions que doit réunir un observateur accompli, et l’on voit