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diverses séparations de l’Église officielle : on vit naître les séparatistes, les piétistes, les hernutes, les paisibles, toutes ces sectes enfin, diversement nommées et désignées, mais qui avaient toutes pour unique dessein de s’approcher de la divinité, surtout par Jésus-Christ, plus que la chose ne leur semblait possible sous la forme de la religion nationale.

L’enfant entendait parler sans cesse de ces opinions et de ces croyances, car les ecclésiastiques, aussi bien que les laïques, se déclaraient pour ou contre. Les dissidents, plus ou moins prononcés, étaient toujours en minorité, mais leur caractère attirait par l’originalité, la cordialité, la persévérance et la fermeté. On contait sur ces vertus et sur leurs manifestations toute sorte d’histoires. La réponse d’un pieux maître ferblantier fut particulièrement remarquée. Un de ses confrères crut le confondre en lui demandant quel était donc proprement son confesseur. Plein de sérénité et de confiance en sa bonne cause, il répliqua : « J’en ai un très-distingué : ce n’est rien moins que le confesseur du roi David. »

Ces choses et d’autres semblables peuvent bien avoir fait impression sur l’enfant et l’avoir disposé à des sentiments pareils. Quoi qu’il en soit, il conçut l’idée de s’approcher immédiatement du grand Dieu de la nature, du créateur et conservateur du ciel et de la terre ; car les manifestations de sa colère, qui m’avaient frappé antérieurement, s’étaient depuis longtemps effacées devant la beauté de l’univers et les biens de toute sorte qui nous y sont dispensés. Mais l’enfant suivit pour arriver à son but un chemin très-singulier. Il s’était attaché principalement au premier article de foi. Le Dieu qui est en relation immédiate avec la nature, qui la reconnaît et qui l’aime comme son ouvrage, lui semblait le Dieu véritable, qui peut entrer dans un rapport plus intime avec l’homme, comme avec tout le reste, qui veillera sur lui comme sur le mouvement des étoiles, sur les heures, les saisons, les plantes et les animaux. Quelques passages de l’Évangile le déclaraient expressément. L’enfant ne pouvait prêter à cet être une figure : il le cherchait par conséquent dans ses œuvres et il voulut lui élever un autel, à la véritable manière de l’Ancien Testament. Des productions naturelles devaient représenter le monde en symboles ; au-des-