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sion, d’autant plus efficace qu’elle était fortifiée par l’exemple de Wieland : car les ouvrages de sa deuxième époque brillante prouvaient clairement qu’il s’était formé sur ces maximes. Et que pouvions-nous demander de plus ? La philosophie était mise de côté avec ses abstruses exigences ; les langues anciennes, dont l’étude coûte tant de peines, étaient repoussées dans l’enfoncement ; les compendium, sur la suffisance desquels Hamlet nous avait déjà soufflé à l’oreille un mot significatif, devenaient plus suspects tous les jours ; on nous recommandait la méditation d’une vie agitée, que nous menions si volontiers, et la connaissance des passions que nous sentions dans notre cœur ou dont nous avions le pressentiment, et qui, autrefois condamnées, devaient désormais nous paraître importantes et respectables, parce qu’elles devaient être l’objet principal de nos études, et que l’on en recommandait la connaissance comme le moyen le plus excellent de former nos facultés. En outre, cette manière de penser s’accordait tout à fait avec ma propre conviction, avec mon activité poétique. Ainsi donc, après avoir vu tant de bons desseins anéantis, tant d’honnêtes espérances évanouies, je n’opposai aucune résistance à la volonté de mon père, qui m’envoyait à Strasbourg, où l’on me promettait une vie heureuse et riante, tandis que je poursuivrais mes études pour arriver au doctorat.

Au printemps, ma santé, et plus encore mon jeune courage, se trouvaient rétablis, et j’aspirais de nouveau à quitter la maison paternelle, mais par de tout autres motifs que la première fois ; ces belles chambres, où j’avais tant souffert, m’étaient devenues importunes ; on ne pouvait lier aucun commerce agréable avec mon père ; je ne pouvais lui pardonner tout à fait d’avoir montré une impatience peu raisonnable pendant les récidives de ma maladie et pendant ma lente guérison, et, au lieu de me consoler avec indulgence, de s’être exprimé d’une façon cruelle sur une chose qui n’était au pouvoir de personne, comme si elle n’avait dépendu que de la volonté. Mais, de mon côté, je l’avais blessé et offensé de plusieurs manières.

En effet, les jeunes gens rapportent de l’université des idées générales, ce qui est fort bien sans doute ; mais, comme elles leur donnent une grande confiance dans leur habileté, ils les