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pas ! comme il brave l’orage et le soleil ! Des arbres antiques décorent sa tête, et, ainsi couronné, il regarde au loin de toutes parts : mais, si une partie s’écroule, elle ne reste pas ce qu’elle était ; elle tombe brisée en mille pièces qui couvrent la pente. Là même, elles ne veulent pas s’arrêter ; elles bondissent vivement jusqu’au pied de la montagne ; le ruisseau les reçoit et les porte à la rivière ; sans résister, sans regimber, non pas anguleuses, mais polies, arrondies, elles vont plus vite leur chemin, et, de rivière en rivière, elles arrivent enfin à l’Océan, où les géants passent en troupes, où les nains foisonnent dans les profondeurs.

« Mais qui célèbre la gloire du Seigneur, que les étoiles magnifient d’éternité en éternité ? et pourquoi regardez-vous au loin ? Observez ici l’abeille, qui, dans les derniers jours d’automne, moissonne encore diligemment, et comme un maître et un ouvrier, se bâtit une maison régulière. Considérez la fourmi : elle connaît sa route et ne la perdra point ; elle se bâtit une demeure avec des brins d’herbe, des miettes de terre et des feuilles de sapin. Cependant c’est en vain qu’elle travaille : le cheval foule et disperse tout. Voyez, il écrase les poutres, il disperse les planches ; impatient, il ronfle et ne peut rester en repos ; car le Seigneur a fait du cheval le compagnon du vent et l’escorte de la tempête, afin qu’il porte l’homme où il veut et la femme où elle désire. Mais le lion s’est avancé dans la forêt de palmiers ; il a parcouru le désert d’une marche grave ; là, il règne sur tous les animaux, rien ne lui résiste, et pourtant l’homme sait l’apprivoiser ; la plus cruelle des créatures est saisie de respect devant l’image de Dieu, laquelle est aussi le modèle des anges qui servent Dieu et ses serviteurs ; car, dans la fosse aux lions, Daniel ne s’effraya point ; il resta ferme et joyeux, et le rugissement farouche n’interrompit nullement son chant pieux. »

L’enfant accompagnait par moments de sons agréables ce discours, prononcé avec l’expression d’un sincère enthousiasme : quand le père eut fini, le petit garçon chanta d’une voix claire et pure, avec de jolies roulades, les paroles suivantes, que le père accompagna de la flûte à l’unisson :

« Ici, dans la fosse, j’entends sortir de la tombe le chant du prophète : les anges balancent leurs ailes pour le fortifier. Le