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par terre violemment la gentille bête qu’il caressait, laisse le chien hurlant et sa femme effrayée. Un duel et bien des conséquences fâcheuses, non pas le divorce, il est vrai, mais une convention secrète de vivre séparés, enfin un ménage gâté, furent la conclusion de cette histoire. »

Ce récit n’était pas achevé, lorsque Eulalie parut dans l’assemblée ; Eulalie était partout la bienvenue et l’un des plus beaux ornements de ce club ; c’était un esprit cultivé et un heureux écrivain.

On mit sous ses yeux les méchantes femmes, péché d’un habile artiste envers le beau sexe ; on la pressa de s’intéresser à ses sœurs plus dignes d’estime.

« Apparemment, dit Amélie, une explication de ces aimables figures doit embellir encore l’almanach ; apparemment, tel ou tel écrivain ne manquera pas d’esprit pour expliquer et démêler parfaitement ce que l’artiste a enchevêtré dans ces figures. »

Sinclair, ami de l’éditeur, ne pouvait ni abandonner tout à fait les images, ni contester qu’une explication ne fût çà et là nécessaire ; il reconnut qu’une caricature ne peut se passer d’un texte, et que c’est, en quelque sorte, ce qui lui donne la vie. Quelques efforts que l’artiste puisse faire pour montrer de l’esprit, il n’est jamais là sur son terrain. Une caricature sans légende, sans explication, est comme muette, et le langage lui donne seul quelque valeur.

AMÉLIE.

Eh bien, faites quelque chose, par la parole, de la petite figure que voici ! Une dame s’est endormie dans un fauteuil, tout en écrivant, à ce qu’il semble ; à ses côtés, une autre personne lui présente une tabatière ou quelque autre boîte, et elle pleure. Qu’est-ce que cela signifie ?

SINCLAIR.

Il faut donc que je joue le rôle de commentateur, quoique les dames ne paraissent bien disposées ni pour les caricatures ni pour leurs interprètes. On a voulu, m’a-t-on dit, représenter ici une femme auteur, qui avait coutume d’écrire pendant la nuit, qui se faisait tenir l’encrier par sa femme de chambre, et forçait la pauvre enfant de rester dans cette posture, même quand le sommeil avait gagné sa maîtresse et rendu ce service