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LOUISE.

Même quand elle est bonne ?

LE VIEILLARD.

Aucune inclination n’est bonne en soi : elle l’est seulement en tant qu’elle produit quelque bien.

LOUISE.

  • Et si l’on avait de l’inclination pour la bienfaisance ?

LE VIEILLARD.

Il faut s’interdire d’être bienfaisant, aussitôt que l’on ruine par là ses affaires domestiques.

LOUISE.

Et si l’on avait une irrésistible inclination pour la reconnaissance ?

LE VIEILLARD.

On a déjà pourvu à ce que jamais chez les hommes la reconnaissance ne puisse devenir une inclination. Toutefois, le cas supposé, il serait cligne d’estime, l’homme qui aimerait mieux se montrer ingrat que d’entreprendre pour l’amour de son bienfaiteur quelque chose de honteux.

LOUISE.

Il pourrait donc exister une foule d’histoires morales ?

LE VIEILLARD.

Oui, dans ce sens ; cependant toutes ces histoires ne diraient rien de plus que mon avoué : c’est pourquoi l’on peut, dans le fond, l’appeler unique ; néanmoins, vous avez raison de le dire, la matière peut être diverse.

LOUISE.

Il fallait vous expliquer plus précisément, nous n’aurions pas disputé.

LE VIEILLARD.

Mais aussi nous n’aurions pas discouru. Les confusions et les malentendus sont les sources de la vie active et des conversations.

LOUISE.

Je ne puis encore être tout à fait de votre avis. Quand un brave homme en sauve d’autres au péril de sa vie, ne fait-il pas une action morale ?

LE VIEILLARD.

Non pas dans le sens que j’ai attaché à cette expression ;