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se montroit çà et là, il porteroit des draps, matelas et couvertes de mon logis ; il m’y apprêteroit un bon lit.

« Je le trouvai bon, et, le soir, y allai et y trouvai une trèsbelle femme, âgée de vingt ans, qui étoit coèffée de nuit, n’ayant qu’une très-fine chemise sur elle, et une petite jupe de revêche verte, et des mules aux pieds, avec un peignoir, et me plut bien fort, et, me voulant jouer avec elle, je ne lui sçus faire résoudre, si je ne me mettois dans le lit avec elle, ce que je fis…. Le lendemain, je lui demandai si je ne la pourrois pas voir encore une autre fois ; que je ne partirais que dimanche, dont cette nuit-là avoit été celle du jeudi au vendredi.

« Elle me répondit qu’elle le souhaitoit plus ardemment que moi, mais qu’il lui étoit impossible, si je ne demeurois tout dimanche, et que, la nuit du dimanche au lundi, elleme verrait. Et, comme je lui en faisois difficulté, elle me dit : « Je crois * que maintenant vous avez dessein de partir dimanche, mais « quand vous songerez à moi, vous serez bien aise de rester « un jour davantage pour me voir une nuit. »

» Enfin je fus aisé à persuader, et lui dis que je lui donnerois « cette journée, pour la voir, la nuit, au même lieu. Alors « elle me repartit : « Monsieur, je sçai bien que je suis en « un b..... infâme, où je suis venue de bon cœur pour vous « voir, de qui je suis amoureuse…. Or une fois n’est pas cou« tume ; et, forcée d’une passion, on peut venir une fois dans « le b ; mais ce seroit être une g…. publique, d’y retourner « la deuxième fois. Je n’ai jamais connu que mon mari et vous, « ou que je meure misérable, et n’ai pas dessein d’en connoître « jamais d’autre. Mais que ne feroit-on pas pour une personne « que l’on aime et pour un Bassompierre ? C’est pourquoi je « suis venue au b mais ç’a été avec un homme qui a rendu « ce b honorable par sa présence. Si vous voulez me voir « une seconde fois, ce sera chez une de mes tantes. »

« Elle m’indiqua la maison avec la plus grande exactitude, et ajouta : « Je vous y attendrai, depuis dix heures jusques à mi« nuit, et plus tard encore laisserai la porte ouverte. A l’entrée, « il y a une petite allée, que vous passerez vite, car la porte « de la chambre de ma tante y répond, et trouverez un degré « qui vous mènera à ce second étage. »