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Notre ancien et fidèle associé Werner, dont les affaires s’accroissaient et se multipliaient comme à l’infini, avait besoin d’hommes actifs pour le seconder, mais il ne se les attachait pas avant de les avoir bien éprouvés. Il avait envoyé un de ces agents à Macarie, pour négocier avec elle au sujet des sommes considérables qu’elle avait résolu et promis de consacrer à la nouvelle entreprise, surtout en considération de Lénardo, son favoii. Ce jeune homme, devenu l’aide et l’associé de Werner, simple et charmant, véritable apparition, se fait remarquer par un talent particulier, une merveilleuse habileté dans le calcul de tête, avantage toujours précieux, mais particulièrement dans l’entreprise que l’on formait alors, puisque l’on devait régler et arrêter ensemble les articles infiniment divers d’un compte de société. Même dans les relations ordinaires dela vie, où, en discourant sur ce qui se passe dans le monde, on parle souvent de chiffres, de sommes et de balances, un homme pareil est d’un très-heureux secours. D’ailleurs il joue du piano trèsagréablement, en quoi son talent de calcul et un aimable naturel, unis et associés, le secondent admirablement. Sous sa main, les sons s’accordent d’une manière facile et harmonieuse ; quelquefois aussi il fait sentir qu’il n’est pas étranger aux plus hautes sphères, et, par là, sa personne est pleine d’attrait, bien qu’il parle fort peu et qu’il laisse à peine échapper dans la conversation quelque trait de sentiment. Il paraît plus jeune que son âge ; on pourrait presque lui trouver quelque chose d’enfantin. Quoi qu’il en soit, il a gagné l’affection d’Angéla et Angéla la sienne, à la grande joie de Macarie, car elle souhaitait depuis longtemps de voir mariée cette noble jeune fille.

Cependant, toujours circonspecte, et persuadée qu’il serait bien difficile de la remplacer, Angéla avait déjà écarté de tendres avances ; peut-être même avait-elle fait violence à une inclination secrète : mais, depuis qu’on pouvait songer à mettre une personne à sa place, une personne qui même était déjà désignée, elle paraissait s’abandonner avec complaisance, et même avec passion, à une impression soudaine.

Mais nous sommes conduits maintenant à faire la révélation la plus importante : car toutes les choses dont nous avons discouru depuis longtemps se sont peu à peu combinées, puis