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CHAPITRE V.

Journal de Eiénardo.

Lundi, 15 septembre.

Aprés avoir gravi péniblement la moitié de la montagne, je suis arrivé, la nuit étant déjà fort avancée, dans une auberge passable, et, avant le point du jour, j’ai été réveillé, à mon vif chagrin, d’un sommeil réparateur, par un long tintement de cloches et de sonnettes. Une grande file de chevaux de somme avait passé, avant que j’eusse achevé de m’habiller, pour prendre les devants. J’appris bientôt, en poursuivant ma route, combien une pareille compagnie est désagréable et factieuse. Le bruit monotone des clochettes assourdit les oreilles ; la charge, qui déborde beaucoup de part et d’autre sur les flancs de l’animal (elle consistait cette fois en balles de coton), frotte souvent contre les rochers, et, si la bête, pour éviter cette géne, s’approche de l’autre côté, le fardeau paraît suspendu sur l’abîme, et donne le vertige au spectateur ; ce qu’il y a de plus fâcheux, c’est que, dans l’un et l’autre cas, on est empêché de passer à côté et de prendre les devants.

-Enfin j’arrivai sur un rocher isolé, à côté de la route ; là Saint-Christophe, qui portait gaillardement mon bagage, salua un homme, qui se tenait debout et tranquille, et semblait passer le convoi en revue. C’était en effet le chef. Non-seulement un grand nombre des bêtes de somme lui appartenait (il avait loué les autres avec leurs guides), mais il était aussi propriétaire d’une petite partie des marchandises. Cependant son affaire principale était de surveiller fidèlement, pour le compte de gros