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mence à être mise en question, les hommes d’un certain âge, bien qu’ils soient encore dans leur pleine vigueur, éprouvent, au plus léger sentiment que leurs forces pourraient décliner, une impression infiniment désagréable, et même une sorte d’angoisse.

Toutefois une autre circonstance, qui aurait dû alarmer le major, contribua, au contraire, à le mettre en bonne humeur : son cosmétique valet de chambre, qui ne l’avait pas abandonné, même au milieu de cette excursion champêtre, semblait, depuis quelque temps, entrer dans une autre voie, où devaient le pousser le lever matinal du major, ses sorties à cheval et ses courses journalières, tout comme les visites de beaucoup de gens affairés et aussi d’oisifs, pendant le séjour du grand chambellan. Le valet de chambre épargnait, depuis quelque temps, au major toutes les minuties auxquelles un histrion pouvait seul être assujetti ; mais il ne s’en attacha que plus rigoureusement à quelques points essentiels, qu’un futile charlatanisme avait déguisés jusqu’à ce jour. Tout ce qui pouvait conserver, non pas l’apparence de la santé, mais la santé elle-même, fut recommandé plus fortement, et surtout la modération en toutes choses, les changements appropriés aux circonstances, le soin de la peau et des cheveux, des sourcils, des dents, des mains et des ongles, auxquels cet homme habile avait déjà donné soigneusement la longueur la plus convenable et la forme la plus élégante. Enfin, après avoir instamment recommandé la tempérance dans tout ce qui peut faire sortir l’homme de son équilibre, il demanda son congé, le major n’ayant plus besoin de ses services. Cependant l’on pouvait supposer qu’il ne serait pas fâché de rejoindre son premier maître, afin de se livrer désormais aux jouissances variées de la vie théâtrale.

Et en effet le major se trouva fort bien d’être rendu à luimême. L’homme sage n’a besoin que de se modérer pour être heureux. Il se livrait en liberté, selon ses anciennes habitudes, à l’exercice du cheval, à la chasse et aux distractions qui l’accompagnent. Dans ces moments de solitude, l’image d’IIilarie venait de nouveau lui sourire, et il s’accommodait à sa position de fiancé, la plus agréable peut-être qui se puisse offrir dans notre société civilisée.