Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome VII.djvu/124

Cette page n’a pas encore été corrigée


« Que suis-je devant l’univers ? se dit-il à lui-même. Comment puis-je subsister devant lui, subsister dans son centre ? »

Cependant, après un instant de réflexion, il poursuivit :

« Le résultat de notre soirée d’aujourd’hui explique également l’énigme de l’heure actuelle. Comment l’homme peut-il se présenter en face de l’infini, sinon en recueillant au fond de son être toutes ses forces intellectuelles, qui sont entraînées de divers côtés ; en se disant à lui-même : « Peux-tu seulement te c sentir au milieu de cet ordre éternel et vivant, s’il ne se « produit pas en même temps chez toi un mouvement sublime « qui circule autour d’un centre pur ? Et lors même qu’il te « serait difficile de découvrir ce centre dans ton sein, tu le re« connaîtrais à ce qu’une influence bienveillante, bienfaisante, « émane de lui et en rend témoignage. » Mais qui peut jeter un regard sur sa vie passée, sans être, en quelque façon, troublé de reconnaître le plus souvent que sa volonté fut juste et sa conduite mauvaise, ses vœux répréhensibles, et néanmoins leur accomplissement agréable ? Que de fois n’ai-je-pas vu briller ces astres, et ne m’ont-ils pas trouvé toujours différent ! Mais eux, ils sont toujours les mêmes, et disent toujours la même chose : « Nous marquons, disent-ils sans cesse, par « notre course régulière les jours et les heures : demande-toi « quel usage tu fais des heures et des jours. » Cette fois, du moins, je puis répondre : « Je n’ai pas à rougir de ma situation « présente ; mon but est de rétablir une désirable union entre,r tous les membres d’une vertueuse famille : ma route est tra* cée. Je dois rechercher ce qui sépare de nobles âmes ; je dois « écarter les obstacles, de quelque nature qu’ils soient. » Tu peux le déclarer à la face de ces armées célestes ; si elles prenaient garde à toi, elles souriraient, je le sais, de ta faiblesse, mais sans doute elles honoreraient ton dessein et en favoriseraient l’accomplissement. »

Après ces méditations, il promena ses regards autour de lui et ses yeux rencontrèrent Jupiter, astre de bon augure, aussi brillant que jamais. Il en tira un présage favorable, et demeura quelque temps avec joie dans cette contemplation.

Là-dessus l’astronome, l’ayant invité à descendre, lui fit observer cet astre, merveille du ciel, avec une excellente lunette,