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« Cependant n’y montez pas encore auprès de moi. 11 en est ici un autre, dont je songe à me faire accompagner dans cette course d’essai : il a lui-même encore une épreuve à subir. »

Julie appela Lucidor, qui s’entretenait dans ce moment à voix basse avec son père et son beau-père, et qui se laissa volontiers embarquer dans le léger équipage, parce qu’il éprouvait un besoin invincible de se distraire un moment par un moyen quelconque. Il prit place à côté de Julie, qui donna ses ordres au postillon. Aussitôt ils partirent et disparurent dans un nuage de poussière, aux yeux des assistants surpris. Julie s’appuya et se mit à son aise dans un coin de la voiture.

« Reculez aussi dans le vôtre, monsieur mon beau-frère, afin que nous puissions nous regarder commodément.

LUCIDOR.

Vous comprenez mon trouble, mon embarras. Je suis encore comme dans un songe ; aidez-moi à me réveiller.

JUL1K.

Voyez comme ces gentils paysans nous saluent gracieusement ! Depuis que vous êtes chez nous, vous n’êtes pas encore allé au village de là-haut. Tous gens à leur aise et qui me sont dévoués. Il n’en est point d’assez riche pour qu’on ne puisse lui témoigner sa bienveillance, en lui rendant quelque service important. Ce chemin, que nous parcourons si commodément, c’est mon père qui l’a établi, et c’est encore’une de ses bonnes actions.

LUCIDOR.

Je le crois volontiers et je vous l’accorde : mais que me font les objets extérieurs dans le trouble où je suis !

JULIE.

Patience : je veux vous montrer les royaumes du monde et leur gloire. Nous voici en haut ! Comme la plaine s’étale agréablement jusque vers la montagne 1 Tous ces villages doivent beaucoup à mon père, à ma mère et à leurs filles aussi. Le bailliage s’étend jusqu’à la banlieue de cette petite ville que vous voyez là-bas.

LUCIDOR.

Je vous trouve dans une singulière disposition d’esprit : ce que vous dites ne semble pas être ce que vous vouliez dire.