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Chapitre XIV

La conversation des deux nouveaux amis fut bientôt vive et familière. Car, lorsque Wilhelm eut fait connaître au jeune homme découragé ses rapports avec les parents de la demoiselle ; qu’il se fut offert pour médiateur, et qu’il eut montré lui-même les meilleures espérances, la sérénité reparut dans l’âme attristée et soucieuse du prisonnier : il se voyait déjà délivré, réconcilié avec les parents de sa femme, et dès lors il fut question de ce qu’il pourrait faire pour subsister.

«  Cela ne doit pas vous embarrasser, dit Wilhelm ; car vous me semblez l’un et l’autre destinés par la nature à réussir dans la profession que vous avez choisie. Un extérieur agréable, une voix sonore, un cœur plein de sentiment : des acteurs peuvent-ils être mieux doués ? Je puis vous offrir quelques recommandations, et je serais charmé de vous être utile.

— Je vous remercie de tout mon cœur, répondit Mélina, mais il me sera difficile d’en profiter, car, si je puis faire autrement, je ne reparaîtrai jamais sur le théâtre.

— Vous avez grand tort, » dit Wilhelm après un moment de silence, pendant lequel il s’était remis de son étonnement ; car il n’avait pas douté que le comédien, une fois qu’il serait libre avec sa jeune femme, ne revînt bien vite au théâtre. Cela lui semblait aussi naturel et nécessaire qu’à la grenouille de chercher l’eau : il n’en avait pas douté un instant, et c’était avec surprise qu’il apprenait le contraire.

«  Oui, reprit Mélina, j’ai résolu de ne jamais en revenir au théâtre, de me charger plutôt d’un emploi civil, quel qu’il soit, et puissé-je en obtenir un !

— C’est là une singulière résolution, que je ne saurais approuver ;