Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome VI.djvu/502

Cette page n’a pas encore été corrigée

498 LES AKXËES D’APPRENTISSAGE

Vous êtes donc plus équitable, plus juste, je puis dire, envers ce beau caractère, que maintes personnes auxquelles on a, comme à vous, communiqué ces mémoires. Tout homme cultivé sait quels rudes combats il a dû soutenir avec lui-même et avec les autres ; combien son éducation lui a coûté d’efforts, et à quel point il oublie, dans certains cas, ce qu’il doit aux autres pour ne songer qu’a lui-même. Combien de fois l’homme vertueux se reproche-t-il de n’avoir pas agi avec assez de délicatesse Cependant, lorsqu’un beau naturel pousse la délicatesse et les scrupules jusqu’aux dernières limites, et même, si l’on veut, jusqu’à l’excès, le monde semble n’avoir pour lui aucun support, aucune indulgence. Et pourtant ces natures d’élite sont hors de nous ce que l’idéal est en nous ; ce sont des modèles proposés, non pas à notre imitation, mais à notre émulation. On rit de la propreté des Hollandaises, mais notre amie Thérèse serait-elle ce qu’elle est, si elle n’avait constamment ce modèle dans la pensée au milieu de son ménage ? ` ?

Ainsi donc, reprit ’\Yilhelm, je retrouve dans l’amie de Thérèse cette Nathalie, si chère à sa vertueuse parente, cette Nathalie, si compatissante, si tendre et si secourable dès son enfance Ce n’est que dans une pareille famille qu’un pareil cœur pouvait naître. Quel tableau se déroule devant moi, quand j’envisage, d’un regard, vos ancêtres et tout le cercle auquel vous appartenez

Je conviens, répondit Nathalie, qu’en un certain sens, vous ne pouviez être mieux informé sur notre famille que parle récit de notre tante cependant son amour pour sa nièce l’a portée à dire trop de bien de moi. Quand on parle d’un enfant, on ne dit jamais ce qu’il est, mais ce qu’on espère de lui. D

Wilhelm avait réfléchi soudain qu’il connaissait aussi maintenant la naissance et les premiers ans de Lothaire ; il voyait la belle comtesse, encore enfant, avec les perles de sa tante autour du cou ; lui-même, il s’était trouvé bien près de ces perles, quand les lèvres amoureuses de la comtesse s’étaient posées sur les siennes. Il tachait d’éloigner par d’autres pensées ces beaux souvenirs ; il passait en revue les personnes que cet écrit lui avait fait connaître.

’c Ainsi donc, disait-il, je suis dans la maison de cet oncle