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DE WILHELM MEISTER. 449

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tombe où sommeille la malheureuse mère, permettez-moi de vous demander pourquoi vous ne prenez pas soin de l’enfant, d’un fils, dans lequel tout homme mettrait sa joie, et que vous semblez négliger complétement. Avec votre sensibilité si tendre et si pure, comment pouvez-vous oublier entièrement l’amour paternel ? Vous n’avez pas dit encore un seul mot de la précieuse créature dont les grâces fourniraient matière à tant de récits.

De qui parlez-vous ? Je ne vous comprends pas. Eh de qui, si ce n’est de votre fils, du fils d’Aurélie, de ce bel enfant, au bonheur duquel il ne manque rien qu’un tendre père, qui veuille s’intéresser à lui ?

Vous êtes dans une erreur complète, mon ami, s’écria Lothaire. Aurélie n’avait point de fils, et surtout point de fils de moi. Je ne sais rien d’aucun enfant, autrement je m’en serais chargé avec joie. Mais je n’en veux pas moins considérer la petite créature comme un héritage de mon amie, et prendre soin de son éducation. A-t-elle cependant fait jamais entendre qu’elle en fût la mère, et qu’il m’appartînt ?

Autant qu’il me souvienne, je ne lui ai rien ouï dire de formel mais chacun le croyait, et je n’en ai pas douté un moment.

Je pourrais, dit Jarno, vous donner là-dessus quelques éclaircissements. Une vieille femme, que vous devez avoir vue souvent, apporta l’enfant à Aurélie ; elle l’accueillit avec passion, espérant que cet objet apaiserait sa douleur ; et en effet il lui a procuré quelques heureux moments. »

Cette découverte avait rendu Wilhelm très-inquiet ; ses pensées se reportèrent vivement sur la bonne Mignon et sur le beau Félix il laissa voir qu’il désirait sortir ces deux enfants de la position dans laquelle ils se trouvaient.

C’est bien fàcile, dit Lothaire ; nous remettrons à Thérèse la singulière petite fille ; elle ne saurait tomber en de meilleures mains ; pour le petit garçon, vous ferez bien, je pense, de le garder auprès de vous ; car, si les femmes elles-mêmes laissent en nous quelque chose d’imparfait, les enfants achèvent de nous former, quand nous leur donnons des soins.

Surtout je suis d’avis, ajouta Jarno, que vous renonciez