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DE WILHELM MEISTER. 4~t

porte. Pour moi, je l’avoue, je me représente la morale comme un régime, qui ne mérite ce nom qu’autant que je le prends pour règle de vie et ne le perds pas de vue de toute l’année. Ils fouillèrent parmi les volumes, et trouvèrent quelques-uns de ces livres qu’on nomme des ouvrages d’édification. « C’est de ma mère, dit Thérèse, que Lydie a pris l’usage de recourir à ces lectures elle se nourrissait de romans et de comédies, tant que l’amant était fidèle s’éloignait-il, aussitôt ces ouvrages reprenaient faveur. Je ne puis comprendre, poursuivitelle, comment on a pu croire que Dieu nous parle par des livres et des histoires. Si l’univers ne nous révèle pas immédiatement ses rapports avec nous, si notre cœur ne nous dit pas ce que nous devons a nous-mêmes et aux autres, nous aurons de la peine à l’apprendre dans les livres, qui ne sont propres qu’à donner des noms à nos erreurs. »

Thérèse laissa Wilhelm seul, et il employa la soirée à faire la revue de la petite bibliothèque ce n’étaient en effet que des volumes rassemblés au hasard.

Pendant les quelques jours qu’il passa chez elle, Thérèse se montra toujours égale à elle-même ; elle lui raconta, avec de grands détails et à différentes reprises, la suite de son histoire les jours et les heures, les lieux et les discours étaier t présents à sa mémoire nous allons rapporter, en abrégé, ce qu’il est nécessaire de faire connaître à nos lecteurs.

La cause du brusque départ de Lothaire ne se devine que trop aisément. Il avait rencontré la mère de Thérèse dans ses voyages elle l’avait captivé par ses charmes elle n’avait pas été avare de ses faveurs. et cette malheureuse intrigue d’un moment l’éloignait d’une femme que la nature semblait avoir formée pour lui. Thérèse se renferma dans le cercle de ses travaux et de ses devoirs. On apprit que Lydie s’était arrêtée secrètement dans le voisinage. Cette rupture, dont elle ne connaissait pas la cause, la remplit de joie elle se rapprocha de Lothaire, et, s’tl répondit à ses avances, il semble que ce fut plutôt par désespoir que par amour, par surprise que par réflexion, par le besoin de se distraire que par un dessein médité.

Cela ne troubla point le repos de Thérèse elle n’avait plus aucune prétention sur Lothaire, et même. eût~il été son mari,