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LIVRE SEPTIEME.

CHAPITRE I.

Le printemps s’était montré dans toute sa splendeur ; un orage précoce, qui avait menacé tout le jour, fondit sur les montagnes la pluie descendit dans la plaine ; le soleil reparut dans tout son éclat, et, sur le fond grisâtre, se dessinait l’arc magnifique. Wilhelm, à cheval, avançait de ce côté, et contemplait avec mélancolie le brillant phénomène.

Ah ! se disait-il, les plus belles couleurs de la vie ne doiventelles donc nous apparaître que sur un fond ténébreux ? Et faut-il une pluie de larmes pour que nous soyons enchantés ? Un jour serein est comme un jour nébuleux, si nous le contemplons sans être émus ; et qu’est-ce qui peut nous émouvoir, si ce n’est l’espérance que les penchants de notre cœur ne resteront pas sans objet ? Nous sommes émus au récit d’une bonne action ; nous sommes émus à la vue d’un objet harmonieux ; nous sentons alors que nous ne sommes pas tout à fait en terre étrangère ; il nous semble que nous approchons d’une patrie, vers laquelle prend l’essor, avec impatience, la plus intime, la meilleure partie de nous-mêmes." »

Sur ces entrefaites, un piéton atteignit Wilhelm, se joignit à lui, en marchant à grands pas à côté de son cheval, et dit au cavalier, après quelques paroles insignifiantes

Si je ne me trompe, je dois vous avoir déjà vu quelque part.

Je me rappelle aussi votre personne, répondit Wilhelm.