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DE WILHELM MRISTER. 401

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tous ces enfants, qui sont élevés en divers lieux, et que l’on place en pension, tantôt dans un endroit, tantôt dans un autre. Je ne savais d’abord voir aucun plan dans une éducation pareille, ma~ T’nn docteur m’en a dit le secret mon oncle s’est laissé persuader par l’abbé que, si l’on veut réussir dans l’éducation de l’homme, il faut voir où le portent ses penchants et ses désirs. Il faut donc le mettre, aussitôt que possible, en position de satisfaire les uns et de réaliser les autres, afin que, si l’homme s’est trompé, il puisse reconnaître assez tôt son erreur, et que, s’il a rencontré ce qui lui convient, il s’y attache avec plus d’ardeur, et se développe avec plus d’assiduité. Je souhaite que cette singulière tentative puisse réussir avec de si bonnes natures, la chose est praticable peut-être.

Mais, ce qu’il m’est impossible d’approuver chez ces instituteurs, c’est qu’ils écartent soigneusement de ces enfants tout ce qui pourrait les conduire a s’entretenir avec eux-mêmes et avec leur invisible, unique et fidèle ami. J’ai même souvent le chagrin de voir que mon oncle me juge par là dangereuse pour mes neveux. Personne n’est donc tolérant dans la pratique ! Car celui même qui déclare qu’il laisse volontiers à chacun sa manière d’être cherche pourtant toujours à écarter l’influence de ceux qui ne pensent pas comme lui.

Cette résolution d’éloigner de moi ces enfants m’afflige d’autant plus que la vérité de ma croyance m’est plus fortement démontrée. Pourquoi ne viendrait-elle pas d’une source divine, pourquoi n’aurait-elle pas un objet réel, puisqu’elle se montre si efficace dans la pratique ? C’est par la pratique seulement que nous arrivons à la parfaite certitude de notre être pourquoi ne devrait-on pas arriver aussi par la même voie à la connaissance de l’Etre qui nous tend la main pour toute bonne œuvre ? J’avance toujours, je ne recule jamais ; mes actions sont toujours plus en harmonie avec l’idée que je me suis faite de la perfection je trouve tous les jours plus facile de faire ce que je crois juste et bon, malgré la faiblesse de mon corps, qui me refuse souvent ses services tout cela peut-il s’expliquer par la nature humaine, dont j’ai reconnu la profonde corruption ? 2 Pour moi, je ne le crois pas.

Je me souviens à peine d’un commandement ; rien ne s’offre