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DE WILHELM MEISTER. 287

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plus qu’une scène de famille, et la grande idée que toute une race royale périt par des crimes et des désordres intérieurs ne serait plus représentée avec la dignité nécessaire. Mais, si le fond du tableau restait bigarré, mobile, confus, cela nuirait à l’effet des figures. »

Wilhelm prit de nouveau la défense de Shakspeare, et montra qu’il avait écrit pour des insulaires, pour des Anglais, qui sont accoutumés à voir, comme fond du tableau, des vaisseaux et des voyages sur mer, les côtes de France et des corsaires, et il fit sentir que ces choses, tout à fait ordinaires pour eux, suffisent déjà pour nous distraire et nous troubler.

Serlo dut en convenir, et tous deux s’accordèrent à reconnaître que, la pièce devant être jouée sur la scène allemande, ce fond, plus sérieux et plus simple, était le plus convenable à notre génie. On avait déjà distribué les rôles Serlo avait pris celui de Polonius, Aurélie celui d’Ophélie, le nom de Laërtes lui désignait le sien ; un jeune débutant, aux allures vives, à la taille ramassée, fut chargé de jouer Horatio ; le roi et le spectre causèrent seuls quelque embarras on n’avait pour ces deux rôles que le vieux bourru. Serlo proposait le pédant pour jouer le roi Wilhelm protestait de toutes ses forces contre un pareil choix. On ne pouvait en finir.

Wilhelm avait d’ailleurs laissé subsister dans sa pièce les deux rôles de Rosenkrantz et de Guldenstern.

« Pourquoi ne les avez-vous pas fondus en un seul ? lui demanda Serlo ; cette abréviation serait bien facile.

-Dieu me garde d’abréger ainsi ! répliqua Wilhelm ce serait détruire à la fois le sens et l’effet. Ce que sont et ce que font ces deux hommes, un seul ne peut le représenter. On retrouve dans ces petits détails la grandeur de Shakspeare. Cet abord insinuant, ces complaisances et ces révérences, cette servilité, ces flatteries et ces cajoleries, cetempressement, ces manières rampantes, cette ubiquité, cette inanité, cette franche fourberie, cette incapacité, comment un seul homme les pourrait-il exprimer ? Il en faudrait au moins une douzaine, si l’on pouvait les avoir ; car ils ne sont quelque chose qu’en société ; ils sont la société, et Shakspeare a montré bien de la modération et de la retenue, de n’en avoir produit que deux représentants. D’ailleurs il me faut ce