Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome VI.djvu/277

Cette page n’a pas encore été corrigée

DM WILIIELM MKISTER. 273

GOETHE. ANN. D’APPR. jo

tMineiiii &t ; vuydn. njjre au mouiem ou 11 ne pouvait encore s’entendre avec lui-même. Ses sentiments étaient nobles, ses vues étaient pures, et ses projets ne semblaient point condamnables il s’avouait tout cela avec quelque confiance ; mais il avait eu assez d’occasions de remarquer qu’il manquait d’expérience et il attachait, par conséquent, une valeur exagérée à l’expérience des autres, aux résultats qu’ils en tiraient avec conviction, et, par là, il s’égarait de plus en plus. Ce qui lui manquait, il crut que le moyen le plus prompt de l’acquérir était de s’attacher à rassembler et à retenir tout ce qui pouvait s’offrir à lui de remarquable dans les livres et dans la conversation. Il entreprit donc de mettre par écrit les opinions et les idées d’autrui et les siennes, même des conversations tout entières, qu’il jugeait intéressantes. Malheureusement, par cette méthode, il retenait le faux aussi bien que le vrai. Il s’attachait beaucoup trop longtemps a une seule idée, on pourrait dire a une seule sentence, et, par là, renonçait souvent à sa manière naturelle de penser et d’agir, pour suivre, comme des astres conducteurs, des clartés étrangères. L’amertume d’Aurélie et le froid mépris de Laërtes pour les hommes n’égarèrent que trop son jugement ; mais personne n’avait été plus dangereux pour lui que Jarno, dont l’esprit lumineux portait sur les choses présentes un jugement juste et sévère, mais qui avait le défaut d’exprimer ces observations particulières sous forme de maximes générales, tandis que les jugements de l’esprit ne conviennent qu’à un seul cas rigoureusement déterminé et deviennent faux lorsqu’on les applique au cas le plus voisin.

Ainsi Wilhelm, en aspirant à se mettre d’accord avec luimême, s’éloignait toujours davantage de cette unité salutaire ; et, dans ce désordre, il fut bien plus facile à ses passions de tourner tous ses préparatifs a leur avantage, et de l’abuser toujours plus sur le parti qu’il devait prendre.

Serlo profita de la funèbre nouvelle ; et, véritablement, il avait plus sujet chaque jour de penser à réformer son théâtre. Il lui fallait renouveler ses anciens engagements, à quoi il était peu disposé, parce que la plupart des artistes, se croyant indispensables, devenaient plus insupportables de jour en jour ; ou