Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome VI.djvu/265

Cette page n’a pas encore été corrigée

DE WILMELM MEISTER. 261

’"1 1

iuu~Mjips ainsi ae cnateaux en châteaux, où il éveillait et goûtait maint plaisir, non sans trouver les plus agréables et les plus jolies aventures.

Avec sa froideur naturelle, il n’aimait proprement personne ; avec son coup d’œil clairvoyant, il ne pouvait estimer personne ; car il ne voyait jamais que les qualités extérieures des hommes, et il les recueillait dans son répertoire mimique. Mais, avec cela, sa vanité était extrêmement oncnsée, s’il ne plaisait pas à chacun, et s’il n’excitait partout les applaudissements. Il avait fait peu à peu une étude attentive des moyens de les obtenir, et il avait acquis là-dessus une pénétration si vive que, non-seulement sur la scène, mais encore dans la vie ordinaire, il ne savait plus que flatter ; et son caractère, son talent, sa manière de vivre, agirent de telle sorte l’un sur l’autre, qu’il en devint insensiblement un acteur accompli. Même, par une action et une réaction singulières en apparence, mais tout à fait naturelles, sa récitation, sa déclamation et son geste s’élevèrent, par la réflexion et la pratique, au plus haut degré de vérité, de liberté et de franchise, tandis qu’il parut devenir toujours plus réservé, plus artificiel, et même dissimulé et contraint, dans la vie ordinaire et les relations de société.

Nous parlerons peut-être ailleurs de sa destinée et de ses aventures, et nous ne ferons plus ici qu’une observation, c’est que, plus tard, lorsqu’il fut devenu un homme fait, avec une réputation établie, une situation fort belle, quoique peu solide, il avait pris, dans la conversation, l’habitude de faire le sophiste, avec une finesse ironique et railleuse, et rendait ainsi presque impossible tout entretien sérieux. Il employait surtout cette méthode avec Wilhelm, chaque fois que notre ami prenait fantaisie, comme cela lui arrivait souvent, de discuter sur quelque théorie générale. Malgré cela, ils aimaient beaucoup à se rencontrer car la diversité de leurs manières de voir donnait à la conversation beaucoup de vie. Wilhelm voulait tout déduire des idées qu’il avait conçues ; il voulait réduire l’art en système ; il voulait établir des règles expresses, déterminer ce qui était correct, beau et bon, et ce qui méritait l’approbation ; bref, il traitait les questions sérieusement. Serlo, au contraire, prenait les choses d’une façon fort légère, et, sans répondre jamais directe