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bientôt reconnaître pour un chirurgien. Ses manières étaient plutôt rudes qu’aimables, mais sa main était légère et ses secours bienvenus. Il sonda soigneusement les blessures, et déclara qu’elles n’étaient pas dangereuses il allait sur-le-champ les panser, après quoi on pourrait transporter le malade au village le plus proche.

La jeune dame paraissait toujours plus inquiète.

« Voyez, disait-elle, sans pouvoir tenir en place, et en ramenant le vieillard près de Wilhelm, voyez comme on l’a maltraité ! Et n’est-ce pas pour nous qu’il souffre ? »

Wilhelm entendit ces mots, et ne pouvait les comprendre. La dame allait et venait avec agitation. Il semblait qu’elle ne pût détacher ses regards de Wilhelm et qu’en même temps elle craignît de manquer à la bienséance, si elle restait là, tandis qu’avec assez de peine, on commençait à déshabiller le blessé. Au moment où le chirurgien ouvrait la manche du bras gauche, le vieux seigneur, s’étant approché d’elle, lui représenta, d’un ton grave, la nécessité de continuer leur voyage. Wilhelm avait les yeux fixés sur la jeune beauté, et il était si charmé de son regard, qu’il sentait à peine ce qu’on lui faisait.

Sur l’entrefaite, Philine s’était levée pour baiser la main de la gracieuse dame. Quand elles furent a côté l’une de l’autre, il crut n’avoir vu de sa vie un pareil contraste Philine ne lui était jamais apparue sous un jour aussi défavorable. Elle ne devait pas, lui semblait-il, s’approcher d’une si noble créature, encore moins la toucher.

La dame fit plusieurs questions à Philine, mais à voix basse ; enfin elle se tourna vers le vieux seigneur, qui était la, toujours impassible, et lui dit :

Cher oncle, me permettez-vous d’être libérale à vos dépens ? »

Et soudain, elle ôta son manteau, et l’on vit bien qu’elle voulait le donner à l’homme blessé et sans habits.

Wilhelm, que son regard céleste avait captivé jusqu’alors, fut ravi des charmes de sa personne, quand le manteau tomba de ses épaules. Elle s’approcha et l’étendit sur lui doucement. Alors, comme il voulait ouvrir la bouche et bégayer quelques mots de remerciement, la présence de cette jeune femme pro