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avant de le relâcher, lui infliger une correction, comme vagabond, parce qu’il avait rôdé pendant quelques jours dans les environs, passé la nuit dans les moulins, enfin appuyé une échelle contre un mur de jardin, qu’il avait escaladé.

Wilhelm ne trouvait à toute l’affaire rien de bien remarquable, lorsque Mignon survint à la hâte, et protesta que le prisonnier était Frédéric, qui, depuis ses démêlés avec l’écuyer, avait disparu loin de la troupe et avait cessé de nous occuper.

Notre ami, que ce jeune garçon intéressait, accourut, et trouva déjà dans la cour du château les apprêts du supplice, car le comte aimait la solennité, même en ces occasions. Le jeune garçon fut amené ; Wilhelm intervint, et pria que l’on voulût bien faire une pause, attendu qu’il connaissait le jeune homme, et qu’il avait à donner d’abord sur son compte divers éclaircissements. Il eut de la peine à faire écouter ses représentations ; cependant il finit par obtenir la permission de s’entretenir seul à seul avec le délinquant. Celui-ci lui protesta qu’il ne savait absolument rien d’une attaque dont un comédien avait été victime ; il n’avait rôdé autour du château, et ne s’y était glissé de nuit que pour chercher Philine, dont il s’était fait indiquer la chambre, et il y serait certainement arrivé, si on ne l’avait surpris en chemin.

Wilhelm qui, pour l’honneur de la troupe, n’avait nulle envie de révéler cette liaison, courut à l’écuyer, et le pria, lui qui connaissait les personnes et la maison, d’arranger l’affaire et de délivrer Frédéric.

Cet homme enjoué composa, avec le secours de Wilhelm, une petite histoire : l’enfant avait fait partie de la troupe et s’était sauvé, mais il avait repris fantaisie de la rejoindre et d’y rentrer. Il avait voulu aller de nuit à la recherche de ses protecteurs, pour obtenir leur appui. On déclara du reste qu’il s’était toujours bien conduit ; les dames s’en mêlèrent, et il fut relâché.

Wilhelm se chargea de lui : c’était le troisième membre de la singulière famille que, depuis quelque temps, il regardait comme la sienne. Le vieillard et Mignon accueillirent avec amitié le déserteur, et tous trois s’unirent dès lors pour servir avec zèle leur protecteur et leur ami, et pour lui être agréables.