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fougueux attelage de Phébus s’éleva hennissant. Soudain le dieu éclaira vivement les pieux Éthiopiens, qui habitent les lieux les plus reculés de la terre. Bientôt, secouant sa chevelure enflammée, il s’éleva des forêts de l’Ida, pour éclairer les Troyens affligés et les vaillants Achéens.

Cependant les Heures, s’élançant dans l’éther, atteignirent la divine demeure du fils de Saturne, qu’elles saluent éternellement. Elles entrèrent, et Vulcain, s’approchant à la hâte, d’un pas boiteux, vint au-devant d’elles et leur adressa ces paroles pressantes :

« Divinités trompeuses, promptes pour les heureux, lentes pour l’impatience, écoutez-moi : docile à la volonté de mon père, j’ai bâti cette salle, selon le mode divin du plus beau chant des Muses ; je n’ai épargné ni l’or, ni l’argent, ni l’airain, ni le métal blanc, et, tel que je l’ai achevé, l’ouvrage subsiste encore entier, sans être altéré par le temps. Car ici la rouille ne l’attaque point, et la poussière, compagne du voyageur terrestre, ne saurait l’atteindre. J’ai fait tout ce que peut faire l’art créateur. Le toit sublime de l’édifice repose inébranlable, et le pavé poli invite le pied à la marche. Chaque dieu est suivi de son trône, qui obéit à ses ordres, comme le chien suit le chasseur ; j’ai fait aussi des enfants d’or qui marchent, et soutiennent le fils de Saturne, à son arrivée, comme je me suis fait aussi une vierge d’airain. Mais tout cela est sans vie. À vous seules il est donné, aux Grâces et à vous seules, de répandre sur la figure morte les attraits de la vie. À l’œuvre donc ! n’épargnez rien, et, de la corne aux parfums, de la corne sacrée, versez alentour un charme divin, afin que je m’applaudisse de mon ouvrage, et que les dieux, ravis, me célèbrent toujours comme autrefois. »

Et les déesses légères sourirent doucement ; elles firent un gracieux signe de tête au vieillard, et, d’une main prodigue, versèrent alentour la vie et la lumière, tellement que nul mortel ne l’aurait pu soutenir, et que les dieux furent enchantés.

Vulcain s’avançait donc à la hâte vers le seuil, l’esprit tendu vers le travail, car le travail seul animait son cœur. Junon le rencontra, accompagnée de Minerve, qui conversait avec elle.