Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome IX.djvu/525

Cette page n’a pas encore été corrigée

et nous vîmes une délicieuse petite tête, qui n’avait pas encore été séparée du tronc, nous regarder par-dessous ses cheveux épars, et, peu à peu découverte, une figure gracieusement animée, vêtue avec une décence remarquable, du reste peu endommagée, et une des mains parfaitement conservée.

Aussitôt nous nous rappelâmes fort bien de l’avoir vue à sa première place, sans prévoir qu’elle pourrait se trouver un jour si près de nous. Assurément, si quelqu’un, après avoir fouillé à grands frais toute une année, avait enfin rencontré un pareil trésor ; il se serait trouvé fort heureux. Nous ne pouvions nous lasser de la contempler : cependant nous finîmes par nous retirer en promettant une prompte réponse. Nous consultâmes Angélique, nous consultâmes M. Zucchi et sa bienveillante compagne.

Leurs représentations nous firent comprendre combien une pareille entreprise était difficile et délicate. Des hommes paisibles, voués jusqu’alors à l’étude des arts et de l’antiquité, s’engageaient tout à coup dans le commerce des objets d’art, et éveillaient la jalousie des gens du métier. Les difficultés de la restauration étaient diverses ; nous pouvions être déloyalement servis ; à supposer que l’expédilion se fît avec tout l’ordre possible, il pouvait encore s’élever à la fin des obstacles à la sortie d’une œuvre d’art si remarquable ; la traversée, le débarquement, le transport et l’arrivée étaient sujets à bien des chances fâcheuses. Ces représentations me firent peu à peu renoncer à mon dessein, mais ce ne fut pas sans regret, d’autant que cette statue arriva enfin à de grands honneurs : elle se trouve aujourd’hui dans un cabinet réservé du Musée Pie-Clémenlin.

Visconti a décrit ce monument dans son troisième volume, consacré à ce musée, il l’a expliqué à sa manière, et l’a figuré dans la trentième planche. Tout ami des arts doit regretter avec moi que nous n’ayons pas réussi à faire parvenir cet ouvrage en Allemagne, pour l’ajouter à quelqu’une de nos collections nationales.

On trouvera naturel que, dans mes visites d’adieux, je n’aie pas oublié la charmante Milanaise. J’avais appris depuis quelque temps sur son compte bien des choses agréables ; que sa liaison avec Angélique était toujours plus intime, et qu’elle savait