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plus favorable, elles faisaient maintenant la joie et l’admiralion de tous nos amis. L’œil était véritablement enchanté. On croyait revoir et sentir encore l’humidité de la mer, les ombres bleues des rochers, les tons jaune rongeâlre des montagnes, la fuite des lointains dans le ciel éclatant de lumière. Mais ces feuilles n’étaient pas seules à produire un effet si favorable : chaque tableau posé ù la méfie place, sur le même chevalet, paraissait plus vigoureux et plus surprenant. Je me souviens que parfois, en entrant dans la cha :nbre, un de ces tableaux produisait sur moi comme un effet magique.

Le secret d’un jour favorable ou défavorable, direct ou indirect, qui n’élait pas encore découvert, était parfaitement senti et admiré, mais considéré comme accidentel et inexplicable.

Ce nouveau logement nous conduisit à placer dans un ordre gracieux et dans un bon jour un certain nombre de plâtres, qui s’étaient rassemblés peu à peu autour de nous, et c’est alors seulement que nous jouîmes de ces précieux trésors.

Si l’on se trouve, comme c’est le cas à Rome, continuellement en présence des œuvres plastiques de l’antiquité, on se sent, comme en présence de la nature, devant l’infini, l’insondable. L’impression du beau, du sublime, si bienfaisante qu’elle puisse êlre, nous inquiète ; nous désirons exprimer en paroles nos sentiments, notre contemplation, mais pour cela il faudrait d’abord connaître, approfondir, comprendre : nous commençons par diviser, distinguer, classer, et, cela même, nous le trouvons, sinon impossible, du moins extrêmement difficile, et nous revenons enfin à la jouissance, à une admiration contemplative.

Mais, en général, c’est l’effet le plus marqué de toutes les œuvres d’art, qu’elles nous transportent dans les circonstances du temps et des hommes qui les ont produites. Entouré de statues antiques, on se sent dans une vie naturelle animée ; on apprend à connaître la diversité de la figure humaine, et l’on est ramené absolument à l’homme, dans sa condition la plus pure,.ce qui rend le contemplateur lui-même vivant et purement humain. Même le costume, assorti à la nature, et qui contribue encore à relever la forme, produit, dans un sens