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vez donné, a-t-il dit, tant de marques de bienveillance et de bonté, vous avez exercé une telle action sur toute ma vie, que je vous prie d’accepter ici un symbole de ce que je vous dois. » Comme je ne trouve point de paroles dans ces occasions, je lui ai répondu en peu de mots que par son activité il avait déjà fait de moi son débiteur, et qu’en mettant à profit et en retravaillant nos trésors communs, il m’obligerait encore davantage. Là-dessus, nous nous sommes quittés comme il arrive rarement à des personnes que le hasard a rapprochées pour peu de temps. Peut-être la vie nous offrirait-elle beaucoup plus de satisfaction et d’avantages, si l’on se déclarait mutuellement avec franchise ce qu’on attend l’un de l’autre. Les obligations sontelles remplies, on est satisfait des deux côtés, et l’affection, qui est, en tout, le commencement et la fin, se produit comme par surcroît.

Sur la route, du 4 au 6 juin.

Comme je voyage seul cette fois, j’ai tout le temps de revenir sur les impressions des derniers mois, et je le fais avec beaucoup de plaisir. Cependant je reconnais bien souvent des lacunes dans mes observations. Si le voyage semble à celui qui l’a fait, passer d’un même cours, et se présente à l’imagination comme une suite continue, on sent toutefois qu’il est impossible d’en donner une juste idée. Le narrateur doit tout présenter isolément : comment cela formerait-il un ensemble dans l’esprit de ceux qui l’écoutent ? Aussi ai-je appris avec infiniment de plaisir par vos dernières lettres que vous vous occupez assidûment de l’Italie et de la Sicile ; que vous lisez des récits de voyages et que vous étudiez des gravures : l’assurance que mes lettres y gagnent m’est un grand soulagement. Si vous l’aviez fait ou si vous me l’aviez dit plus tôt, j’aurais montré encore plus de zèle. En réfléchissant que j’ai été devancé par des hommes distingués, comme Bartels, Mùnter, des architectes de divers pays, lesquels assurément poursuivaient des desseins extérieurs avec plus de soin que moi, qui n’avais en vue que les plus intimes, je me suis souvent tranquillisé, quand j’étais forcé de reconnaître l’insufOsance de mes efforts.

Si, en général, un homme ne doit être considéré que comme un supplément de tous les autres, et, s’il ne paraît jamais plus