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un peu, j’étais obligé d’ôter mon manteau. A chaque instant mon chapeau courait le risque d’être emporté dans le cratère et moi-même après. Je m’assis pour me reprendre et pour contempler la contrée. Mais je ne me trouvais pas mieux dans cette position : l’orage venait justement de l’est, par-dessus le pays magnifique étendu sous mes pieds, auprès et ail loin, jusqu’à la mer. La vaste plage de Messine à Syracuse, avec ses courbures et ses golfes, se déployait devant mes yeux, ou tout à fait découverte ou seulement un peu cachée par les rochers du rivage. Quand je fus redescendu, tout étourdi, je trouvai que Kniep avait bien employé son temps dans un lieu abrité, et fixé en traits délicats sur le papier ce que l’orage furieux m’avait ù peine permis de voir, bien loin que je l’eusse gravé dans mon souvenir.

Revenus dans la gueule du Lion-d’Or, nous trouvâmes le domestique de louage, que nous avions eu de la peine à détourner de nous accompagner. Il nous approuva d’avoir renoncé à l’ascension de l’Etna, mais il nous proposa vivement pour le lendemain une promenade par mer aux rochers de Jaci. C’était la plus belle partie de plaisir qu’on pût faire de Catane. On emportait des vivres, avec les ustensiles nécessaires pour faire cuire quelque chose. Sa femme offrait de se charger de ce soin. Il se rappelait avec délices une de ces promenades, où des Anglais s’étaient même fait suivre d’une musique dans un bateau particulier. C’était un plaisir inimaginable. Les rochers de Jaci m’attiraient vivement ; j’avais un grand désir d’en détacher des zéolithes aussi belles que celles que j’avais vues chez le chevalier Gioeni. On pouvait arranger l’affaire et décliner la compagnie de la dame ; néanmoins le fantôme de l’Anglais et ses avertissements ont triomphé ; nous avons renoncé aux zéolilhes, et nous nous savons fort bon gré de notre retenue. %

Catane, dimanche G mai 1787.

Notre ecclésiastique ne s’est pas lassé. Il nous a menés voir les restes de constructions antiques : elles exigeraient de l’observateur un rare talent de restauration. On nous a montré les débris des bassins d’une naumachie et d’autres ruines encore ; mais la ville a été si sou vent ravagée par les laves, les tremblements de