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Ferrrare, 16 octobre 1786, de nuil.

Arrivé ce matin à sept heures, de notre cadran, je me prépare à partir demain. Pour la première fois, je suis surpris d’une sorte de déplaisir, dans cette ville grande et belle, plate, dépeuplée. Autrefois une cour brillante animait ces rues ; ici demeurèrent, l’Arioste, mécontent, le Tasse, malheureux. Et nous croyons nous édifier en visitant ce séjour ! Le tombeau de l’Arioste contient beaucoup de marbre mal distribué. Au lieu de la prison du Tasse, on montre un bûcher, une charbonnière, où assurément il ne fut jamais enfermé. Dans la maison même, à peine quelqu’un sait-il encore ce qu’on veut. Ils Unissent par se raviser en faveur du pourboire. Cela me fait souvenir de la tache d’encre du Dr Luther, que le châtelain renouvelle de temps en temps. La plupart des voyageurs tiennent du compagnon, et s’enquièrent volontiers de ces signes caractéristiques. J’étais devenu tout chagrin, en sorte que j’ai pris peu d’intérêt à un bel institut académique, fondé et enrichi par un cardinal originaire de Ferrare. Cependant je me suis arrêté avec plaisir dans la cour devant quelques monuments antiques. Ensuite j’ai été égayé par une bonne idée d’un peintre. JeanBaptiste est en présence d’IIérode et d’IIérodias. Le prophète, dans son costume sauvage, désigne la dame d’un geste violent. Elle regarde avec un calme parfait le prince assis auprès d’elle, et le prince regarde l’enthousiaste d’un air sage et tranquille. Devant le roi est un chien blanc, de grandeur moyenne ; sous la robe d’Hérodias, se montre un petit bichon : tous deux aboient le prophète. Voilà qui me semble heureusement imaginé.

Cento, 17 octobre, au soir.

J’écris de la ville natale du Guerchin dans de meilleures dispositions qu’hier. Mais aussi la situation est bien différente. Une gracieuse petite ville, de cinq mille habitants environ, bien b :ltie, industrieuse, vivante, propre, dans une plaine immense et fertile. Suivant mon habitude, je suis monté d’abord au clocher. Une mer de peupliers, entre lesquels on aperçoit, dans le voisinage, de petites fermes, chacune entourée de son champ. Un sol riche, un doux climat. C’était une soirée d’automne comme