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s’approche d’une table et compte les espèces, sans prendre garde à ce que dit la Marquise.) Mais, comme je disais, c’est une bagatelle…. Si seulement mon projet réussit, nous sommes en fonds pour toujours…. Les joailliers de la cour ont depuis longtemps dans leurs mains un riche collier, qu’ils désirent vendre ; le chanoine a tant de crédit, qu’ils le mettront aisément dans ses mains, s’il leur garantit un payement à terme, et je…. LE Marquis, se tournant du côté de la Marquise. Que dis-tu de termes ?… de payement ?




LA MARQUISE.

Tu n’écoutes donc pas ? Tu es tout à l’argent ?

LE MARQUIS.

Voici ta moitié. La mienne sera bien employée. Vois donc comme je me suis ajusté. (Il se montre à la Marquise, et va se regarder au miroir.)

La Marquise, à part. Quel homme vain et petit !

Le Marquis, se retournant. Que voulais-tu dire ?

LA Marquise.

Tu aurais été plus attentif, si tu avais pu soupçonner de quelle importante affaire je parlais. Il ne s’agit de rien moins que de faire notre fortune d’un seul coup.

LE MARQUIS.

Et comment ?

LA MARQUISE.

Te souviens-tu d’avoir entendu parler ilu riche collier que les joailliers de la cour ont fait monter, dans l’espérance que le prince en ferait cadeau à sa fille ?

LE MARQUIS.

Parfaitement. Je l’ai même vu chez eux cette semaine, comme j’achetais cette bague. Il est d’une incroyable beauté. On ne sait ce qu’on doit le plus admirer de la grosseur des pierres, de leur égalité, leur eau, leur nombre, ou du goût avec lequel elles sont assemblées. Je ne pouvais le quitter des yeux ; cette bague ne paraissait plus rien auprès. Je m’en allai fort mécontent, et, pendant quelques jours, ce collier ne pouvait me sortir de la mémoire.