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exercer ton esprit, animer ta science, voilà ce que je désire. C’est ainsi que je voudrais bien mériter de toi…. Tout enfant peut écouter et apprendre : mes disciples doivent observer et deviner. Quand j’ai prononcé le nom de cophte, n’as-tu rien imaginé ?




LE CHANOINE.

Cophte ! cophte !… Si je dois te l’avouer, si j’ose pa/ler sans gêne devant toi, mon imagination quitta aussitôt cette partie du monde froide et bornée ; elle se transporta dans cette chaude région où le soleil couve encore d’ineffables mystères. Je vis tout à coup l’Égypte se présenter devant moi ; une sainte obscurité m’environna ; je m’égarai parmi les pyramides, les obélisques, les énormes sphinx, les hiéroglyphes ; un frisson me saisit…. Là, je voyais errer le grand cophte ; je le voyais entouré de disciples, qui étaient liés, comme par des chaînes, à sa bouche inspirée.

LE COMTE.

Cette fois, ton imagination ne t’a pas égaré. Oui, ce grand, ce sublime, et, j’ose bien dire, cet immortel vieillard, est celui dont je vous parlais, que vous pouvez espérer de voir un jour. Dans une éternelle jeunesse, il voyage depuis des siècles sur cette terre. Les Indes, l’Kgypte, sont sa résidence préférée. Il parcourt nu les déserts de Libye ; il y recherche en paix les secrets de la nature. Qu’il étende son bras impérieux, le lion affamé s’arrête ; le tigre furieux s’enfuit devant sa voix menaçante, pour que la main du sage puisse chercher en paix les racines salutaires, et distinguer les pierres qui, par leurs vertus secrètes, sont plus précieuses que l’or et les diamants.

LE CHANOINE.

Et cet homme admirable, nous le verrons ? Donne-moi un signe qui me montre comment cela est possible.

LE COMTE.

Oh ! que ta vue est bornée ! Quels signes te donnerais-je, à toi dont les yeux sont fermés ?

LE CHANOINE.

Un mot seulement !

LE COMTE.

Il suffit !… J’ai coutume de ne jamais dire ce que l’auditeur doit savoir.




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