Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome III.djvu/442

Cette page n’a pas encore été corrigée

auxquelles une foi puissante, un amour sans bornes, sont nécessaires pour une action qui ne sera jamais assez estimée. Assurément tu es entouré d’un beau cercle d’hommes qui te ressemblent ; je ne dis pas qui t’égalent’…. Observe-toi ; observe ton propre cœur et celui de tes amis : et, si tu trouves une mesure surabondante d’amour, de dévouement, de force et de courage, que ce joyau, avec une mystérieuse bénédiction, soit livré secrètement au plus digne.




LE CONSEILLER.

Je sais, je comprends ta position. Je ne puis, je ne saurais délibérer d’abord mûrement avec moi-même, comme la sagesse le demanderait : je veux lui parler. (La Gouvernante s’approche d’Eugénie.) Ce qui doit arriver arrivera ! Dans les choses tout ordinaires le choix et la volonté ont beaucoup d’influence ; mais les grands événements de notre vie, qui sait comment ils s’accomplissent ?

SCÈNE II.

EUGÉNIE, LE CONSEILLER.

LE CONSEILLER.

Jeune beauté, que je révère, quand tu t’approches de moi, je doute presque qu’on m’ait bien informé. Tu es malheureuse, dit-on ; et pourtant, où que tu paraisses, tu portes avec toi la joie et la félicité.

EUGÉNIE.

Si le premier auquel, du sein de ma profonde misère, j’ose adresser un regard et une parole, se trouve aussi noble et aussi doux que tu me parais l’être…. cette angoisse, je l’espère, se dissipera.

LE CONSEILLER.

Une personne de grande expérience serait à plaindre, si elle avait eu en partage le sort qui te poursuit : combien la douleur de la jeunesse, affligée pour la première fois, n’appelle-t-elle pas la compassion par sa détresse ?

EUGÉNIE.

Naguère je me relevai de la nuit du tombeau à la lumière du jour ; je ne savais ce qui m’était arrivé, avec quelle violence une

G(£THE. — TIt. ll 28