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Une place pris d’un port. D’un côté, un palais ; de l’autre, une église ; au fond, une rangée d’arbres, à travers lesquels on aperçoit le port.


SCÈNE I.

EUGÉNIE, enveloppée d’un voile, assise dans le fond, sur un banc, le visage tourné vers la mer ; LA GOUVERNANTE, UN CONSEILLER, sur le devant de la scène.

LA GOUVERNANTE.

Une triste mission, à laquelle je n’ai pu me soustraire, me pousse du centre du royaume, loin de l’enceinte de la capitale, aux limites du continent, vers ce port ; ainsi une grave inquiétude me suit pas à pas, et me montre avec alarme le lointain. Ah ! que les conseils et la sympathie d’un homme dont tout le monde connaît la noblesse el la loyauté, doivent être pour moi une apparition ravissante et comme un astre fidèle ! Pardonne donc, si, avec cette feuille, qui m’autorise à remplir cet acte rigoureux, je m’adresse à toi, que l’on a vanté longtemps comme défenseur, et que l’on vante maintenant comme juge dans les tribunaux, où tant d’hommes justes exercent leur pouvoir.

Le Conseiller, qui a examiné la feuille d’un air pensif. Ce n’est point mon mérite, c’est seulement mon zèle, qui fut peut-être louable. Mais il me paraît singulier que ce soit précisément celui qu’il te plaît d’appeler noble et juste, que tu consultes dans une pareille affaire ; que tu mettes, avec confiance, sous ses yeux un pareil papier, où il ne peut jeter la vue sans horreur. Il n’est pas question de droit et de justice. Ceci est une violence, une violence horrible, dût-elle même agir avec