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LE CHEVALIER.

Ne le dites pas, ne me punissez pas si cruellement. Chacune de vos paroles me fait une profonde blessure. Auprès du mien, votre sort est digne d’envie. Vous pouvez dire : * On m’a rendue malheureuse ; •» et quelle insupportable douleur dois-je ressentir, quand je me dis : * Elle te compte aussi parmi les hommes qui ont concouru à sa perte ! » Oh ! pardonnez-moi ! pardonnez à une passion qui, par un malheureux hasard, en désaccord avec elle-même, a blessé ce qui était pour elle, peu d’instants auparavant, l’objet le plus cher et le plus précieux du monde. Il faut nous séparer ! La douleur que j’éprouve, dans cette situation, est inexprimable. Reconnaissez mon amour et plaignez-moi. Oh ! pourquoi n’ai-je pas suivi mon sentiment, et n’ai-je pas couru chez le chanoine après cette fortuite découverte ! J’aurais gagné un ami, une amante, et j’aurais pu jouir avec joie de mon bonheur. Tout est perdu pour moi.

LE COMMANDANT.

Remettez-vous.

LA NIÈCE.

Adieu ! Ces dernières, ces consolantes paroles me seront toujours présentes. (Au Commandant.) Je vois dans vos yeux qu’il faut que je parte. Puisse votre humanité recevoir sa récompense ! (Elle s’éloigne avec la garde.)

LE COMMANDANT.

La pauvre enfant me fait pitié. Venez ! Tout s’est bien passé. Votre récompense ne se fera pas attendre.

LE CHEVALIER.

Qu’elle soit ce qu’elle voudra, aussi digne d’un prince que je puis l’attendre, je ne pourrai jouir de rien, car je n’ai pas bien agi. Je n’ai plus qu’un désir et qu’une espérance, c’est de consoler cette bonne jeune fille et de la rendre à elle-même et au monde.


FIN DU GRAND COPHTE.