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Oh ! malheureux que je suis ! Oh ! que n’avez-vous gardé avec moi un éternel silence ! Que ne m’avez-vous laissé cette douce erreur ! Vous détruisez la plus agréable illusion de ma vie !

LA NIÈCE.

Je ne vous ai pas appelé pour vous flatter, mais pour vous supplier, comme un homme généreux, de me secourir et me sauver. Hàtez-vous ; éloignez-vous !… Nous nous reverrons demain. Ne dédaignez pas une infortunée créature, qui lève les yeux vers vous comme vers un Dieu sauveur.

LE CHEVALIER.

Je suis perdu, perdu pour jamais ! Si vous saviez ce que vous m’avez ravi dans ce moment, vous trembleriez, vous n’imploreriez pas ma pitié. Je n’ai plus de pitié ! Vous m’avez arraché la foi à moi-même et aux autres, à la vertu, à l’innocence, à tout ce qui est grand et digne d’amour. Plus rien ne m’intéresse, et vous demandez que je m’intéresse à vous ! Ma confiance a été trompée de la manière la plus infâme, et vous voulez que je me fie à vous, à vous, double et triple comédienne ! Quel bonheur que je sois venu ici ce soir, et ne vous aie pas laissé le temps de vous préparer, de mettre le masque, avec lequel vous songiez aussi à m’abuser !

LA NIÈCE.

Mon malheur est au comble. Hàtez-vous ! Éloignez-vous ! On vient.

LE CHEVALIER.

Je m’en vais pour ne jamais vous revoir.

SCÈNE "VIL

LA NIÈCE, LE MARQUIS.

Le Marquis, entr’ouvranl la porte. Étes-vous seule, ma nièce ? Un mot seulement ! La Nièce. Pendant que le Marquis regarde encore au dehors, elle jette, à la dérobée, un coup d’œil au miroir. Je suis tout éplorée, toute troublée ! Que dirai-je ?




Le Marquis,