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WEISLINGEN.

Je ne l’ai pas dit pour t’offenser ; mais je ne puis me taire là-dessus. L’empressement extraordinaire de Charles auprès de toi m’inquiète.

ADÉLAÏDE.

Et ma conduite ?

WEISLINGEN.

Tu es femme. Vous ne haïssez jamais qui vous fait la cour.

ADÉLAÏDE.

Mais vous ?

WEISLINGEN.

Elle me ronge le cœur, cette horrible pensée !… Adélaïde !

ADÉLAÏDE.

Puis-je guérir ta folie ?

WEISLINGEN.

Si tu voulais ! Tu pourrais t’éloigner de la cour.

ADÉLAÏDE.

Dis le moyen et la manière. N’es-tu pas à la cour ? Dois-je te quitter, quitter mes amis, pour m’entretenir dans mon château avec les hiboux ? Non, Weislingen, il n’en sera rien. Tranquillise-toi ! Tu sais comme je t’aime.

WEISLINGEN.

C’est l’ancre de salut dans cet orage, aussi longtemps que le câble ne rompt pas. (Il sort.)

ADÉLAÏDE.

Tu le prends ainsi ! Il ne manquait plus que cela. Les desseins de mon cœur sont trop grands pour que tu doives y faire obstacle. Charles ! Grand homme ! homme excellent, et quelque jour empereur ! Et devrait-il être le seul de tous les hommes que ne flatterait pas la possession de ma faveur ? Weislingen, ne songe pas à m’arrêter, autrement tu seras renversé, et je passerai sur ton corps. (Arrive Franz, portant une lettre.)

FRANZ.

Voici, noble dame.

ADÉLAÏDE.

Est-ce Charles lui-même qui te l’a remise ?

FRANZ.

Oui.