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Tu violes la loi de Mahomet.

LE POËTE. Ami, personne n'écoute, je veux m'ouvrir à toi.

L'ÉCHANSON. Si tu parles enfin de bon gré, je n'aurai pas besoin de te faire tant de questions.

LE POËTE. Écoute, nous autres musulmans, nous devons courber la tête à jeun ; lui, dans son saint zèle, il voudrait être seul égaré.

——

SAKI. O maître, songe que, dans l'ivresse, tu fais jaillir autour de toi la flamme ; mille étincelles brillent en pétillant, et tu ne sais pas où cela prend.

Quand tu frappes sur la table, je vois dans les coins des moines qui dissimulent, les hypocrites, tandis que tu ouvres ton cœur.

Dis-moi donc pourquoi la jeunesse, sans être encore délivrée d'aucun défaut, si dépourvue de toute vertu, est plus sage que la vieillesse ?

Tu connais tout ce qu'enferme le ciel, tout ce que porte la terre, et tu ne caches pas le trouble qui s'éveille dans ton sein.

HATEM. Eh bien, cher enfant, reste jeune et reste sage ; la poésie est, il est vrai, un don du ciel, mais, dans la vie terrestre, c'est un leurre.

On commence par se bercer en secret, puis à se trahir tôt et tard par son bavardage. C'est en vain que le poëte est discret : la poésie elle-même est déjà une trahison.


Nuit d'été

LE POËTE. Le soleil est couché, mais, à l'occident, le ciel brille toujours : je voudrais savoir combien de temps encore durera ce reflet doré.

L'ÉCHANSON. Si tu le veux, seigneur, je resterai, j'attendrai hors des tentes : quand la nuit aura vaincu le crépuscule, je viendrai d'abord te l'annoncer.

Car je sais que tu aimes à contempler les hauts cieux, l'immensité,