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du vin, qu'il fasse jour ou nuit, ivresse divine, qui me charme et me tourmente !

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Ah ! petit fripon ! Que je garde ma connaissance, voilà l'essentiel ; et, de la sorte, je suis aussi charmé de ta présence, aimable enfant, tout ivre que je suis.

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Dans la taverne, de grand matin, aujourd'hui quel tumulte ! Hôte et servantes, flambeaux et gens ! que d'affaires ! que d'insultes ! La flûte jouait, le tambour battait. C'était un affreux chamaillis : cependant, ivre de plaisir et d'amour, j'en ai pris ma part comme un autre.

Chacun me reproche de n'avoir rien appris en morale, mais je me tiens sagement éloigné des disputes de l'école et de la chaire.

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L'ÉCHANSON. Dans quel état, seigneur !... Tu sors bien tard de ta chambre aujourd'hui ! Les Persans appellent cela Bidamag bouden : en Europe, on l'appelle fumées.

LE POETE. Laisse-moi pour le moment, enfant chéri. le monde ne saurait me plaire, ni l'éclat et le parfum de la rose, ni le chant des rossignols.

L'ÉCHANSON. C'est cela même que je veux traiter, et je pense que la chose me réussira. Viens, mange ces amandes fraîches, et tu retrouveras au vin de la saveur.

Puis je veux sur la terrasse te restaurer au souffle de la brise ; aussitôt que mon regard se fixera sur toi, tu donneras un baiser à l'échanson.

Regarde, le monde n'est pas une caverne ; il est riche toujours en nids et en couvées, parfum de rose, essence de rose ; le bulbul aussi chante comme hier.

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