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ou bien, qu'il ait été créé avant les anges, ce n'est peut-être pas non plus une fable. Quoi qu'il en soit, le buveur regarde Dieu en face plus hardiment.

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Ivres, il faut que nous le soyons tous : la jeunesse est une ivresse sans vin ; si le vieillard redevient jeune en buvant, c'est une merveilleuse vertu ; la pauvre vie se tourmente à donner des soucis, et, les soucis, le pampre les chasse.

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On ne s'inquiète plus de cela ! Le vin est sérieusement défendu. S'il faut donc que tu boives, ne bois que du meilleur : tu serais un double hérétique, de te damner pour la piquette.

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De quel vin Alexandre s'est-il enivré ?... Je gage ma dernière étincelle de vie qu'il n'était pas aussi bon que le mien.

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Aussi longtemps qu'on est à jeun, on se plaît au mal ; dès qu'on a bu, l'on connaît le bien, seulement l'excès arrive aussi bien vite ; Hafiz, apprends-moi de grâce comment tu l'entendais.

Car mon avis n'est pas exagéré : si l'on ne peut boire, on ne doit pas aimer ; mais, vous, buveurs, il ne faut pas vous croire en meilleure position : si l'on ne peut aimer, on ne doit pas boire.

SOULEIKA. Pourquoi es-tu souvent si malgracieux ?

HATEM. Tu sais que le corps est une prison ; l'âme y fut enfermée par surprise ; elle n'y trouve pas ses coudées franches : comme elle veut s'échapper çà et la, on enchaîne étroitement la prison elle-même ; la pauvre âme en est doublement offensée :