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Signal.

Et pourtant ils n’ont pas tort, ceux que je blâme : en effet, qu’un mot ait plus d’un sens, c’est ce qui devrait s’entendre de soi-même. Le mot est un éventail. Entre les lames brillent deux beaux yeux. L’éventail n’est qu’un voile charmant : il me cache le visage, il est vrai, mais il ne cache pas la jeune fille, car ce qu’elle a de plus beau, son œil, étincelle dans mon œil.

À Hafiz.

Ce que veulent tous les hommes, tu le sais et tu l’as bien compris, car, de la poussière jusqu’au trône, le désir nous tient tous dans sa rigoureuse chaîne.

Cela fait tant de mal, tant de bien ensuite ! Qui pourrait s’en défendre ? Que l’un s’y rompe le col, l’autre persiste hardiment.

Maître, pardonne-moi ! Tu sais que souvent je m’aventure, quand il entraîne les regards après lui, le cyprès qui marche.

Son pied rase la terre comme des racines menues, et caresse le sol ; son salut nous effleure comme un léger nuage, son haleine, comme une caresse de la brise orientale.

Nous sommes pressés d’un vague désir, lorsque, anneau par anneau, sa brune chevelure déploie sa richesse et qu’elle enfle ses ondes et frémit au souffle du vent.

Puis le front brillant se découvre, pour enlever toute aspérité de ton cœur[1] ; une chanson joyeuse, ingénue, arrive à ton oreille pour bercer ton esprit.

Et qu’ensuite ses lèvres s’animent avec une grâce infinie, elles te laissent libre aussitôt de te mettre dans les chaînes.

L’haleine est suspendue, l’âme vers l’âme s’envole ; des parfums circulent à travers la volupté, et passent, invisibles nuages.

Mais, quand l’ardeur est au comble, ta main saisit la coupe, l’échanson accourt, l’échanson vient et verse et verse encore.

Son œil étincelle, son cœur palpite, il espère tes leçons ;

  1. Hafiz, dans une de ses poésies, compare l’amour à une pierre qui lisse le cœur et le rend aussi poli qu’une glace.