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Comme palpitent, sous tes baisers sans nombre, son sein et ses belles joues ! Sa rigueur devient tremblement, car ton audace devient un devoir. Vite l’amour t’aide à la déshabiller, et il n’est pas de moitié aussi prompt que toi ; puis, malicieux et modeste, il se couvre vivement les yeux avec la main.

Maligne joie.

Sous la forme d’un papillon, je voltige, après mon dernier soupir, vers les places bien-aimées, témoins de plaisirs célestes, dans les prairies, au bord des sources, autour de la colline, à travers la forêt.

Je guette un couple amoureux ; posé sur la tête de la belle jeune fille, des fleurs de sa couronne, je regarde en bas : tout ce que la mort m’a ravi, ici je le revois en image ; je suis aussi heureux que je l’étais.

Elle embrasse son amant avec un muet sourire ; et lui, il met à profit l’heure que lui envoient les dieux propices ; ses lèvres courent du sein à la bouche, de la bouche aux mains, et moi, je voltige autour de lui.

Et elle voit le papillon. Tremblante, aux instances de son ami, elle se lève en sursaut, comme je m’envole. « Mon bien-aimé, viens le prendre ! viens, je serais si contente de l’avoir, ce brillant petit bijou ! »

Innocence.

Ô la plus belle vertu de l’âme, source la plus pure de la tendresse, plus que Byron, que Paméla, idéal et merveille ! Lorsque brûle une autre flamme, ta faible et douce lumière s’enfuit : celui-là seul te sent, qui ne te connaît pas ; qui te connaît ne te sent plus.

Déesse, dans le paradis avec nous tu vivais unie ; tu te montres encore dans mainte prairie, le matin, avant que le soleil paraisse ; le tendre poëte seul te voit passer dans ta robe vaporeuse : Phébus vient, le nuage fuit et tu te perds dans le nuage.

Léthargie.

Pleurez, jeunes filles, pleurez ici, au tombeau de l’Amour : ici un rien, un hasard, l’ont fait succomber. Mais est-il vraiment